Rarement la salle parisienne du Trabendo aura vu sa fosse aussi remplie. Certains ont même dû attendre près d'une heure dans une longue file d'attente avant de pouvoir accéder à cette Get In Step. Une Get In Step sold-out qui accueillait le label Get Hype Records, lancé par The Prototypes en 2016. Au programme, quelques artistes de l'écurie dont Glitch City, Malux et Smooth mais aussi les locaux Drazel et Zorel & Lam-C. Une soirée dont les organisateurs se souviendront.
C'est à 2 heures du matin que Chris du célèbre duo The Prototypes prend le contrôle des platines devant un public chauffé à blanc par Drazel et Glitch city. Mix à 3 platines, des morceaux taillés pour le dancefloor très bien enchaînés, le DJ Brightonien a su conquérir les parisiens. En sueur mais satisfait de sa prestation, il nous a accordé un peu de son temps dans les backstages fumants du Trabendo.
Salut Chris. Merci de nous recevoir. C'est la première fois que tu joues au Trabendo. Peux-tu nous donner ton ressenti sur la salle ?
Le sound-system est très bon. Il y avait une très bonne vibe ce soir. Le public était dingue et j'ai pu échanger avec lui au micro. Quand t'as des gens autant à fond, ça met en confiance pour leur parler et pour être proche d'eux.
Tu utilises souvent le micro durant tes lives ? Tu fais la même chose en Angleterre ?
Jamais. Là bas, nous avons MC 2Shy. Quand on peut, on le prend avec nous quand on part en tournée. Mais quand ce n’est pas possible, surtout en Europe où en général, les gens n'aiment pas les MCs, je fais le MC mais je déteste ça. J’ai une voix trop aiguë.
C'est la troisième fois que The Prototypes joue aux soirées Get In Step. Qu'est-ce que tu aimes en particulier chez eux ?
Pour moi, c'est la deuxième fois (NDLR: Nick autre moitié du duo, a joué lors de la deuxième invitation de Get In Step). Ces gars font de superbes évènements, il y a toujours de bonnes vibes. Ils sont vraiment bons. Et tu sais, c'est juste une question de se faire des amis autour du monde. Tu fais ce job pour connaître ce genre de choses. Tu sais que tu vas passer une bonne soirée avec eux.
Que penses-tu du public français ?
La première fois que suis venu ici, c'était au Petit Bain et c'était vraiment dingue. Il n’y avait pas de MC mais les gens étaient fous. La salle me rappelait un club à Bristol dans une péniche. L'ambiance est similaire à celle de ce soir. Grosses vibes.
C'est mieux qu’en Angleterre ?
C'est différent. Au Royaume-Uni, tu peux balancer plein de sons différents et les gens sauront ce que c'est. Je crois que de nombreux Européens n'ont pas la même culture de la Drum & Bass. Au delà des 5-6 dernières années, ils connaissent moins les morceaux. Donc c’est un peu dur d’avoir une réaction du public sur tout. Mais en général, je joue ce que j’aime. Je ne joue pas forcément que pour le public.
Parlons maintenant de votre label Get Hype Records puisque c'est une soirée qui le met à l'honneur. Qu'est-ce qui vous a poussé à vous lancer dans cette aventure ?
Au départ, pour nous, le label était seulement une plateforme pour sortir nos morceaux. Mais quand ça a démarré, on s’est demandé ce qu’on voulait vraiment faire. Est-ce que ça doit seulement être une plateforme pour sortir nos sons ? Ou est-ce qu'on veut que le label soit l’un des meilleurs de la scène Drum & Bass? La réponse était évidente : on voulait que le label soit l’un des plus gros. C’est juste notre mentalité, on fait ce qu'on fait par amour, on a envie de tout casser et d'aller jusqu'au bout. On n'aime pas échouer Nick et moi.
Est-ce que vous vous attendiez à ce succès ?
Non, nous ne nous y attendions pas. Ce que nous avons appris comme artiste et via le label, c’est de suivre son cœur. Les gens savent quand tu fais de la merde ou quand t’es pas content ou quand le label t'empêche d'exprimer ta musicalité. La raison d’être d’un artiste, c’est de s’exprimer. Quand tu n’y arrives pas, tu fais de la merde et tu deviens dépressif. Si tu t’exprimes et que tu n’arrives à rien, au moins tu auras essayé…tu vois ce que je veux dire ? Suis tes rêves, ton coeur, fais ce que t'as envie de faire. C’est exactement pour ça qu’on a créé le label.
A quels genres de sons peut-on s'attendre pour vos prochaines sorties ?
Des choses plus lourdes. Nous voulons grossir, nous voulons progresser.
Parmi les producteurs qui ont sorti des choses sur Get Hype, un nom a retenu notre attention_ celui de Leeroy Thornill, ex-membre de l'un des plus grands groupes de la musique électronique The Prodigy. Peux-tu nous raconter votre rencontre ?
Je veux dire que Leeroy Thornhill est peut-être la personne la plus sympa que je n’ai jamais rencontré. Les gens savent ce qu'il a fait dans sa carrière mais tu ne dois pas te sentir gêné de parler avec lui. C’est un gars normal. Nick l’a rencontré durant une tournée en Asie. Leeroy a joué un de ses morceaux et Nick lui a demandé si c'était possible de le sortir sur le label. Il lui a répondu que c'était possible. On était fou. En le côtoyant, nous nous sommes rendu compte que nous avions la même vision de ce que doit être un label. Leeroy veut qu’on le laisse être lui même, le laisse libre. Son prochain single va sortir en décembre.
Comment travaillez-vous en général avec les producteurs ? Est-ce que certains sont sous contrat ?
Pour le moment, personne. On n’a pas fait signer de contrat qui stipulerait que l'artiste doit travailler avec nous pour 3 albums par exemple. On n’imposera jamais ça à personne parce qu’on ne pense pas que c’est une façon saine de travailler. Cela pourrait éventuellement changer quand l’argent entrera en compte. Mais si quelqu’un veut partir et qu’on a un contrat, on trouvera une solution. On ne veut pas garder les gens contre leur gré et les rendre malheureux. En fait, il y a tellement d’artistes avec qui on pourrait travailler. Mais il faut qu’on réfléchisse à faire attention à prendre le bon nombre d’artistes pour pouvoir bien les accompagner.
Parlons de votre duo maintenant. Peut-on s’attendre à un nouvel album de votre part ?
Peut-être… (sourire mystérieux)
Comment travaillez-vous à deux ?
On travaille toujours à deux au studio. On se complète. Là où l’un est faible, l’autre est fort.
Qu'est-ce que vous pensez de la scène Drum & Bass et de son évolution en ce moment avec des producteurs comme Benny L ou King Of The Rollers ?
Il y a beaucoup de nouveaux producteurs qui cartonnent et la scène change beaucoup. Je dirais que c’est une bonne chose. La scène doit toujours évoluer. Pour nous, ça veut aussi dire qu'on doit rester à jour mais c’est cool. Certes, peut-être que ce que l’on fait en ce moment n’a pas autant de poids sur la scène mais eux font leurs trucs, nous les nôtres. On reste nous même. On ne va pas se plier à la tendance du moment.
Vous êtes une nouvelle fois invités à la résidence d'Andy C à partir du mois de janvier au club londonien XOYO. Toutes les dates sont Sold-Out dont la vôtre. Cela vous fait quoi ?
C’est un putain d’honneur de jouer avec Andy C. J’ai eu l’occasion d’échanger avec lui et il nous a dit ce qu’il pensait de notre musique…je le trouve époustouflant. Quand je vois ces line up, tous ces artistes qui jouent sont soit des artistes pour qu’il a eu du respect dans le passé et qu’il respecte toujours aujourd'hui, soit des gens qu’il respecte pour ce qu’ils produisent en ce moment. C’est pour ça que les plateaux sont aussi variés et qu’il y autant de labels représentés. Cette résidence est un moyen pour lui de soutenir les artistes qui font leur entrée dans le milieu. Et c’est super cool qu’il fasse ça. Andy C adore la Drum & Bass, il aime tellement ça qu’il veut aider tout le monde à réussir. Et c’est génial.
Dernière question_ en 2011, à l'occasion du 200e épisode du Drum & Bass Arena Podcast consacré aux morceaux qui ont définitivement accroché les producteurs à la scène Drum & Bass. Avec Nick, vous avez choisi "Adam F - Brand New Funk". Peux-tu nous expliquer pourquoi ?
Quand j’écoute les premières notes de ce morceau, je m’enflamme. J’avais l’habitude d’être un gros raver à l’époque. J’adorais ça. Ces soirées, c'est ce qui alimentait mon amour pour la Drum & Bass. C’était mon paradis, c’était l’endroit auquel j’appartenais. Brand New Funk me rappelle cette époque.
Léo Paichard
Crédit photo_ Sofiane Skn // Instagram_ @sknpict